D'un pays à l'autre, les racontars d'un écrivain amateur...

dimanche 8 février 2009

Romain à la ferme

Ma mère m’a souvent dit que ma principale qualité était ma chance. Encore un fois, j’ai de la chance. J’ai donc quitté Osaka pour la province de Kochi sur l’île de Shikoku. L’ambiance de ma destination s’est révélée dès la montée dans le bus : il y avait 4 personnes en tout et nous n’avons pris aucun passager en route. Le paysage était superbe. De la gare de bus de Osaka, tu traverses le quartier des affaires, tu longes le port, puis tu traverses la banlieue en longeant l’océan jusqu’à Kobe. De nouveau tu longes le port (de Kobe cette foi-ci) puis tu te diriges vers le premier des deux ponts gigantesques qui vont t’amener sur l’île de Shikoku. Une fois sur Shikoku, on a longé l’Océan Pacifique pendant 2 bonnes heures. Je quittais enfin les grandes métropoles surchargées. A 17h45, le car s’est arrêté à Ikumi. Le terminus du bus et aussi le mien. Il n’y avait plus que moi dans le bus. Tomoya m’attendait dans sa minuscule camionnette (qu’a dut être distribué gratuitement car je crois que tous les habitants d’Ikumi ont la même). J’allais enfin commencer mon nouveau métier de Wwoofer !
Ikumi est un village d’environ 1500 habitants, pour la majorité des fermiers. Posé au pied des montagne et les siens dans l’Océan Pacifique. C’est un endroit superbe. Calme, silencieux, parsemé de magasin de surf,… C’est un peu irréel. Depuis quelques jours, je suis donc dans ce village à l’autre bout du monde, et j’y suis bien.
La journée commence à 7h avec le petit déjeuner (et Tomoya m’a averti aujourd’hui que le soleil allait se lever plus tôt et donc nous aussi…). Un bol de riz avec un œuf cru, une miso soup, quelques restes de la veille, un café, une clope, Tomoya lit le journal des agriculteurs et m’annonce tous les matins qu’il n’y a rien d’intéressant. 7h30 on enfile nos bottes et on se dirige vers la serre à une trentaine de mètre. A Ikumi, j’ai enfin retrouvé un soleil qui chauffe. Un soleil qui brille sans pollution. A nuit est froide (environ 3° et la maison n’est ni chauffée ni isolée…) mais il fait bon de sortir et de toutes les façons, il fait déjà 12° dans la serre. Dans une heure, on devrait atteindre les 24° nécessaire aux précieuses tomates de Tomoya. Il ne cultive que des tomates (et quelques légumes pour sa consommation personnelle). Dans la serra il y a 1800 pieds de tomates et cette année, Tomoya aimerai récolter 15 tonnes.



Mon premier boulot fut d’enlever les pétales morts sur les tomates. Le deuxième fut de couper les feuilles malades. Je passe donc ma matinée à quatre pattes, debout, penché, à genoux,… à couper et à cueillir. Une rangée compte environ 60 pieds. Pour le moment, on ne s’occupe que de la moitié de la serre. C’est étrange, le boulot n’est pas particulièrement fatigant mais tu es vite exténué. Et mon dos déjà fragile est mis à rude épreuve. Mais qu’il est bon de refaire quelques choses de ses mains, de produire…Et ce travail, routinier, répétitif, est tellement reposant pour la tête. Pendant mes 6 heures de travail quotidienne (réglementé par l’organisation Japonaise du Wwoofing), j’ai le temps de penser, réfléchir, rêver, chanter (dans ma tête je vous rassure),… Et il y a un moment où tu comptes. Un peu moins de deux heures pour enlever les pétales d’une rangée, 60 pieds par rangée, 15 tomates par pieds, soit un peu moins de 2 minutes par tomates. Il y a 1800 pieds. Ce n’est pas fini… Aujourd’hui j’ai fini de m’occuper de six rangées, ça en fait des tomates !
Tomoya est un agriculteur bio. Pas produit chimique, pas de pesticide, … Que des éléments naturel. Par exemple, pour ajouter du magnésium, il laisse tremper une pierre (riche en magnésium, trouvée sur Internet) dans une grande poubelle d’eau, et le tour est joué ! Pareil pour le potassium. Puis il y a tous ces produits à base de poisson (qui put !!!),…C’est sûrement assez basique, mais pour moi ne connaissant pas le monde du bio (ni des légumes à dire vrai), les journées sont pleines de découvertes ! (Si vous avez des questions n’hésitez pas, je demanderai les réponses)
Mon hôte a un peu plus de 35 ans. Ancien salarié de boite de pub à Tokyo, il a tout planqué, fait deux ans d’études pour apprendre les bases du métiers et est venu se perdre à Ikumi. Voyageur, surfeur, rouleur en vélo, cultivé et curieux, passionné de musique, nos discussions deviennent de plus en plus intéressantes.
Must du Must, en me baladant sur la plage, j’ai découvert des blocs pour grimper ! Nous y sommes allés avec Tomoya, puis avec Shié et son mari (des amis). Shié est une gentille femmes de maison et son mari un con prétentieux, imbu de lui-même, raciste et débordant de préjugés ! J’ai aussi fait la rencontre de Shi, une institutrice de 40 ans venu à Ikumi pour le surf à qui j’en donnais 35, et Hachi une surfeuse de 29 à qui j’en donnais 24 ! Le temps ne marque pas les Japonais de la même manière. Il est vraiment difficile de leur donner un age. On s’est tous rencontré hier soir lors d’une soirée bien arrosée. Le réveil ce matin a été dur…
Tout le monde ne parlait pas anglais mais tout le monde faisait des efforts (malgré mon assiduité quotidienne pour apprendre le japonais, ce n’est pas demain que je comparerai l’escalade et le surf dans la langue de Musachi).
Et puis il y a eu cette soirée au « resto » avec Tomoya. La réservation était pour 18h (on mange généralement entre 18h et 18h30). Tomoya me demande de prendre des cigarettes pour deux, car il fume normalement des roulés mais ne veut pas les fumer devant des gens du village. Ils penseraient qu’il fume de la marijuana. C’est assez drôle la relation qu’entretient Tomoya avec les gens du village. Ces derniers sont très méfiant vis-à-vis des nouveaux et encore plus des surfeurs (alors Tomoya qui est les deux…). Il fait donc tout pour bien s’intégrer et ne choquer personne. Pas de marijuana chez lui, alors qu’il en fumait de temps en temps, les pieds de tomates du côté de la rue (à la portée des regards indiscrets) sont installés de manière traditionnelle (debout accrochés à un filin au dessus) mais tous les autres de sa serre sont couchés pour que l’eau arrive plus facilement jusqu’à la fin du pied (technique nouvelles donc étrange)… Donc nous voilà dans ce restaurant : une pièce (un garage plus exactement tout en béton et sans aucune déco), trois tables en plastique, 7 planches de surf, la nourriture déjà prête. Et mamie, qui dès notre arrivée c’est mise à parler et n’a jamais arrêté, et Tomoya acquiescent régulièrement… Deux énormes pancake (tomates, calamar, patates, et autres ingrédients), des nouilles, trois bières (chacun) et une bouteille de saké plus tard on repart avec les restes plus d’autres cadeaux (de la nourriture). Tomoya n’a rien payé. En ce moment, il est très pauvre, donc c’est le troc qui est privilégié. Une caisse de tomates égale un dîner, ou une demi-journée d’aide dans la serre, ou des pâtes d’une entreprise de Yokohama,….
Je vous parlais d’habitudes dans mon dernier billet, cette fois-ci les habitudes sont venues du métier de fermier… Deux heures de boulot le matin, la pause café, deux autres heures, lunch break, puis c’est reparti pour mes deux dernières heures…Toutes les journées sont réglé grâce à l’horloge (électronique) du village : 6h du mat, 12h, 17h et 21h heure d’aller au lit… Le travail (et l’alcool) est fatigant, et en général on dort tous les deux avant 22h !
C’est étrange, beaucoup de choses commencent à me manquer, mes amis, ma famille, les soirées, mais je suis bien et je n’ai aucune envie de rentrer. C’est tellement agréable d’avoir le temps de penser, de vivre, d’être face à une nouvelle culture. D’apprendre.
En parlant d’apprendre, nous avons fait un marché avec Tomoya : je lui apprends à grimper et si je reviens cet été (où il fera plus chaud et surtout où ses tomates lui laisserons plus de temps) il m’apprendra à surfer.
Il est 21h. L’horloge vient de sonner. Tomoya est à un dîner en ville. Il fait 12° dans la maison. Mes questions sur la vie ne me font plus peur, j’ai le temps de trouver des réponses.

2 commentaires:

  1. super billet romain! Ca fait plaisir de voir que tu sembles prendre beaucoup de plaisir. Bonne chance pour la suite.
    pascal, de roc et résine

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  2. Merci Pascal !

    J espere que tu prends autant de plaisir a la salle que je n en ai pris.

    ++

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